1 janvier 2023

2022 : Et vous, qu’avez-vous lu cette année ?

Quelle belle manière de finir l’année que de se remémorer les livres qu’on a lus et tous ceux qui restent à découvrir. Au fil des lectures, des rencontres et de mes passages à la librairie, ma pile à lire ne cesse de s’allonger, preuve qu’une vie ne suffit pas pour lire tout ce qu’on voudrait. Cela dit, en une année, j’ai fait la rencontre de personnages marquants et d’auteurs exceptionnels à travers leurs œuvres. Je vous avais déjà parlé de mes lectures 2022 dans un précédent billet. Voyons ensemble les livres qui ont rejoint la pile “lus” depuis.

Les classiques, une valeur sûre

C’était l’un de mes objectifs de lecture de cette année, lire davantage de classiques. Vous savez, ces romans dont tout le monde dit qu’ils sont tellement excellents que vous n’osez pas avouer que vous n’avez pas lu ou encore que vous n’avez pas accroché. Par exemple, beaucoup s’accordent à penser que L’aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane est un classique de la littérature africaine. Après trois tentatives, je l’ai finalement lu et je ne suis pas sûre de le conserver dans ma bibliothèque. Sachez que vous avez le droit de ne pas aimer un livre que tout le monde trouve bon. L’essai de Daniel Pennac Comme un roman le justifie excellemment. Il y inscrit d’ailleurs les droits imprescriptibles du lecteur.  

Après avoir moyennement apprécié, ou compris, La métamorphose de Kafka, j’ai continué avec Le procès que j’ai trouvé remarquable. Je ne saurai pas vous dire s’il s’agit d’un roman philosophique, d’un roman à thèse ou même d’un roman tout court. C’est typiquement le genre de livre pour lequel je ne vous partagerai jamais d’avis de lecture. Mais, je vous en recommande fortement la lecture. Tout comme Kafka, Stefan Zweig a marqué son époque et continue de faire le bonheur de plusieurs générations de lecteurs. J’ai eu le plaisir de lire Vingt-quatre heures de la vie d’une femme et depuis j’ai déjà rajouté trois autres de ses romans à ma liste de livres à lire.

À propos de classiques, Gabriel Garcia Marquez et son talent de conteur sont une valeur sûre. Cette année, j’ai eu le bonheur de découvrir son formidable roman Cent ans de solitude. J’ai mis pratiquement un mois à lire les 50 premières pages et 4 jours pour lire le reste. Si vous ne l’avez pas encore lu, je vous le recommande vivement. Il a inventé le réalisme magique.

Le procès, roman de Franz Kafka

La capacité d’un livre à traverser le temps fait peut-être partie des raisons pour lesquels on dit que c’est un classique. Mais il ne fait aucun doute que l’auteur contemporain Khaled Hosseini s’inscrit durablement dans l’histoire de la littérature avec Les cerfs-volants de Kaboul et Mille soleils splendides. L’histoire de l’Afghanistan en trame de fond, les personnages marquants qu’il a réussi à créer, les sujets auxquels il s’attaque, son art du récit… Tout est bon à lire chez cet auteur que j’ai découvert, il y a quelques semaines.

J’ai fait connaissance avec…

Tolstoï et Soljenitsyne sont deux auteurs qui me fascinent depuis que j’en entends parler à travers des documentaires et émissions littéraires. Du premier, j’ai lu La mort d’Ivan Ilitch et du second Le déclin du courage, une agréable mise en bouche en attendant de commencer les œuvres majeures qui ont fait d’eux des écrivains emblématiques. Par contre, j’ai vraiment l’impression d’avoir perdu une journée à lire Le coût de la vie de Deborah Levy. Je respecte le travail de toute personne qui écrit et surtout qui publie mais, je ne trouve rien à dire sur ce livre, du moins rien de positif.

J’ai eu un véritable coup de cœur pour Bel abîme de Yamen Manai. Il a une telle façon de “cultiver l’urgence” quand il écrit qu’on a du mal à lâcher le livre avant le point final. Du moins, c’est ce que j’ai ressenti. J’ai hâte de voir ce que ce jeune auteur tunisien nous réserve pour la suite. 

Bel abîme de Yamen Manai

Svetlana Alexievitch est une auteure biélorusse dissidente qui a reçu le prix Nobel de la littérature en 2015 pour « son œuvre polyphonique, mémorial de la souffrance et du courage à notre époque ». Dans son essai documentaire, La guerre n’a pas un visage de femme, elle a choisi de donner la parole aux femmes soviétiques qui ont vécu la deuxième guerre mondiale en tant que soldates, femmes, en mères. Son travail est remarquable et je vous le recommande vivement.

Sur la question de la race et des inégalités

Sur cette thématique, j’ai du mal à choisir le livre qui m’a le plus marquée cette année. J’hésite entre Lady sings the blues, l’autobiographie de Billie Holiday et Nations nègres et culture de Cheikh Anta Diop. Sacrilège ! Diront les disciples de l’éminent scientifique sénégalais. Il est vrai que ses travaux de recherche sur les noirs en Afrique n’ont rien de comparable avec le récit d’une alcoolique qui a profité de rares moments de lucidité pour écrire l’histoire de sa vie. Mais ces deux lectures m’ont édifiée, chacune à sa façon.

Après l’histoire de Billie Holiday, je me suis plongée dans celle de Nina Simone à travers le récit romancé de Gilles Leroy, sobrement intitulé Nina Simone, Roman. On ne peut s’empêcher de noter les similitudes entre ces deux femmes ni d’imaginer quelle aurait pu être leur carrière si elles n’avaient pas été noires. En parlant de femmes noires d’exception, je vous recommande le recueil de discours Et ne suis-je pas une femme ? de Sojourner Truth, cette militante afro-américaine née esclave qui n’a jamais su ni écrire ni lire, ce qui ne l’a pas empêché de laisser son empreinte dans l’histoire. 

Lady sings the blues, livre de Billie Holiday

Je suis noir et je n’aime pas le manioc est un essai de Gaston Kelman plein d’humour qui aborde globalement la question du racisme. À part les exemples cocasses, les idées développées par l’auteur m’ont donné une impression de déjà lu. En revanche, bien que les faits que relatent Colson Whitehead dans ses deux romans Nickel Boys et Underground Railroad soient plus ou moins connus, la lecture de ces deux romans ne vous laissera pas indifférent. S’ils racontent différentes époques, ils prouvent que la blessure raciale en Amérique est inguérissable.

Même si les prix littéraires ne sont pas une garantie d’excellence, il est utile de noter que Nickels Boys et Underground Railroad ont été tous deux couronnés du Pulitzer. Whitehead rentre donc dans le cercle très restreint des auteurs ayant reçu deux fois cette récompense aux côtés de grands noms de la littérature américaine tels que William Faulkner, Booth Tarkington et John Updike.

Je continue à découvrir l’œuvre de…

Bien que le célèbre roman de Dany Laferrière, Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, ne m’a pas fait grande impression, sur recommandation d’un bookstagrammeur, j’ai décidé de lire un autre livre du même auteur. Bien m’en a pris. L’énigme du retour fait partie des dix meilleurs livres que j’ai lus cette année. Encore une fois, pour comprendre Haïti, il faut lire les auteurs haïtiens. Cela dit, j’ai peu accroché à Parabole du failli de l’auteur haïtien Lyonel Trouillot.

De l’auteure nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, j’avais déjà lu L’hibiscus pourpre et Americanah. Cette année, j’ai continué avec le recueil de nouvelles Autour de ton cou. Ce n’est pas celui que je vous recommande pour découvrir cette remarquable auteure. Dans Inventaire des idoles, on retrouve le Elgas de Un Dieu et des mœurs et sa fine analyse de la société sénégalaise. Si ce recueil de chroniques admirablement illustré m’a permis de découvrir certaines figures emblématiques du Sénégal, pour beaucoup de raisons, et ce n’est peut-être pas l’ambition de l’auteur pour cette œuvre, ce livre n’a pas vocation à traverser le temps.

L'énigme du retour, livre de Dany Laferrière

Les livres qui parlent de livres

Si comme moi, vous avez déjà plus de 100 livres dans votre pile à lire, je ne vous conseille pas d’ouvrir Désir d’Afrique. Cet essai de l’écrivain et critique littéraire congolais Boniface Mongo-Mboussa met en avant des figures historiques de la littérature africaine. Vous en ressortirez avec l’envie de lire ou de relire plus de 20 livres. J’ai été peu convaincue par la conversation entre Alain Badiou et Nicolas Truau au sujet de l’amour à notre époque. Mais de cet Éloge de l’amour, je suis ressortie avec une recommandation de lecture, Lettre à D. Histoire d’un amour d’André Gorz. Dans cette lettre, le journaliste franco-autrichien, rend hommage à celle avec qui il a passé 60 ans de sa vie. Le livre commence par ces mots :

« Tu vas avoir quatre-vingt-deux ans. Tu as rapetissé de six centimètres, tu ne pèses que quarante-cinq kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t’aime plus que jamais. »

En 2022, j’ai voulu lire davantage de classiques. On est loin du compte, mais je compte bien continuer. En 2023, je veux lire plus de livres qui parlent de livres et d’écriture, comme le Écrire de Marguerite Duras où la grande dame de la littérature française explique ce que cela signifie pour elle, écrire. Elle y donne aussi sa recette d’écrivain. L’ingrédient principal ? La solitude !

Et vous, qu’avez-vous lu cette année ? 

Livres lus en 2022
L’air de la guerre de Jean Hatzfeld
Les soleils des indépendances d’Ahmadou Kourouma
Orgueil et préjugés de Jane Austen
Les hirondelles de Kaboul de Yasmina Khadra
Les précieuses ridicules de Molière
Laissez-moi de Marcelle Sauvageot
Lettre à Jimmy d’Alain Mabanckou
Martin Eden de Jack London
Les faibles et les forts de Judith Perrignon
La métamorphose de Franz Kafka
Dans la peau d’un noir de John Howard Griffin
La déchéance d’un homme d’Osamu Dazai
I am not your negro de James Baldwin
Demande à la poussière de John Fante
Rafael, derniers jours de Gregory Mc Donald
Des souris et des hommes de John Steinbeck
Ma mémoire assassine de Kim Young-ha
Une saison blanche et sèche d’André Brink
L’étranger d’Albert Camus
Le mythe de Sissyphe d’Albert Camus
Caligula d’Albert Camus
Les sirènes de Bagdad de Yasmina Khadra
« Ô mon George, ma belle maîtresse… » d’Alfred de Musset et George Sand
La pensée blanche de Lilian Thuram
Oscar et la dame rose d’Eric Emmanuel Schmitt
La valse aux adieux de Milan Kundera
Le livre des brèves amours éternelles d’Andrei Makine
Les villages de Dieu d’Emmelie Prophète
La perle de John Steinbeck
Crime et châtiment de Dostoeivski
Gouverneurs de la rosée deJacques Roumain
La férocité blanche de Rosa Amélia Plumelle-Uribe
Parabole du failli de Lyonel Trouillot
Désir d’Afrique de Boniface Mongo-Mboussa
Le procès de Franz Kafka
Bel abîme de Yamen Manai
Je suis noir et je n’aime pas le manioc de Gaston Kelman
Le coût de la vie de Deborah Levy
La mort d’Ivan Ilich de Léon Tolstoi
Lady Sing the Blues de Billie Holiday
Lettre à D Histoire d’un amour d’André Gorz
Eloge de l’amour d’Alain Badiou et Nicolas Truau
Nations Nègres et Culture de Cheikh Anta Diop
La guerre n’a pas un visage de femme de Sveltana Alexievitch
Ode humaniste pour Chibok, pour Leah de Wole Soyinka
L’aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane
Nina Simone, Roman de Gilles Leroy
Vingt-quatre heures de la vie d’une femme de Stefan Zweig
L’énigme du retour de Dany Laferrière
Les cerfs-volants de Kaboul de Khaled Hosseini
Et ne suis-je pas une femme ? de Sojourner Truth
Comme un roman de Daniel Pennac
Inventaire des idoles d’Elgas
Autour de ton cou de Chimamanda Ngozi Adichie
Nickel Boys de Colson Whitehead
Le déclin du courage d’Alexandre Soljénitsyne
Ecrire de Marguerite Duras
Lettre à Ménécée d’Epicure
Underground railroad de Colson Whitehead
Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez
Mille soleils splendides de Khaled Hosseini

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Commentaires

Une lectrice quelque part
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Article très intéressant
Je voudrais lire plus de classique de la littérature africaine . Je pense que désir d’Afrique est parfait pour moi.

reves
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Effectivement, tu seras servie :)
Sony Labou Tansi, Wole Soyinka, Mongo Beti, Ken Bugul, Sami Tchak, Boubacar Boris Diop, Henri Lopes... tout le monde y est

Une lectrice quelque part
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Stefan zweig et Gabriel Garcia Marquez me tentent beaucoup :D